jeudi 13 novembre 2008

Yokohama Zen Rock / Jarring Effects
















Le parcours du label lyonnais Jarring Effects est véritablement jouissif à suivre pour tout auditeur assoiffé d’éclectisme et d’expérimentations sonores. Après avoir été LE label de la musique dub en France, Jarring Effects s’éloigne de plus en plus de ses roots. Mais l’exotisme est toujours de mise dans la plupart de ses sorties… et ce premier album de l’atypique formation Yokohama Zen Rock en est l’illustration parfaite.
Leur musique est composée de judicieux délires hétéroclites, à fort penchant électro-rock, alliant rock’n’roll et lyrisme au fracas discret des machines, alternant folie douce et démence pure, s’abreuvant d’une énergie tantôt furieuse et grandiloquente, tantôt profonde et enivrante. Avouons-le, le génie vocal de Yôkô Higashi, ange schizo balançant entre ordre et chaos, est l’atout majeur de YZR : glissant avec aisance lorsqu’on ne lui fournit en pâture que quelques accords, pulsant la fois suivante comme celle d’une rock star sur des riffs endiablés, puis se décomposant sur des rythmiques brisées par les mains expertes de Spagg, l’homme-machine du Peuple de l’Herbe. Sa voix claire, son chant en japonais, apaisé ou torturé, toujours poétique, accrochent et fascinent. Cette artiste multiple rompue au chant traditionnel, au théâtre Nô et à la danse Butô, est aussi à l’aise dans un registre folklorique que punk, et est capable à tout moment de virer dans l’expérimental illuminé. Elle imprègne ainsi chaque morceau de son charme étrange.
Mais loin de n’exister qu’à travers une belle voix et des lyrics dépaysants, le groupe coordonne habilement ses talents pour donner aux divers paysages traversés le plus de relief possible. La guitare omniprésente et protéiforme de Takeshi Yoshimura accompagne admirablement Yôkô, tandis que Spagg parasite subtilement et efficacement l’ensemble : le long de belles et puissantes plages aux brumes narcotiques nimbées d’une électro métallique par exemple, semblables à un enregistrement digital esquinté d’une mer démontée (« Rosoku », « GNP »), mais aussi lors de passages plus tubesques (le punk-rock endiablé de « Kill me » ou le rêveur « Miminari »), d’escapades bushido-bucoliques mutantes mais harmonieuses (« Plongée », « Futten »)… les forces de chacun fusionnant définitivement sur « Kome, éloge de la fuite », et « Yokohamashika », qui prouvent en quelques minutes bien remplies que l’alliage entre chant traditionnel nippon, guitares saturées et électro grouillante est à même de trancher avec succès dans le gras des protocoles rassurants mais sans saveur que d’aucuns se complaisent à ingurgiter béatement. Le premier album de Yokohama Zen Rock n’est pas un chef d’œuvre, juste un objet obscur qui illumine un peu de sa fraîcheur et de sa vitalité la morne plaine hypertrophiée de l’industrie discographique.

Myspace de Yokohama Zen Rock

Aucun commentaire: